Mercredi 1er février, à Paris, au Centre Panthéon, s'est tenu, à l'occasion de la rentrée solennelle de l'École doctorale d'économie, gestion, informatique et communication (EGIC) de Panthéon-Assas université, un colloque [1] visant recueillir le témoignage des doctorants et post-doctorants, quant à leur expérience de travail de recherche interdisciplinaire.
Nous retiendrons une série de témoignages d'une grande richesse, allant des travaux de l’EFREI Paris, la Grande École du numérique, portant sur l'analyse de données multimodales au service des ressources humaines et de la formation continue, ou encore sur l’IA pour modéliser la locomotion équine, jusqu'à des recherches couvrant l'Histoire et la sémiotique d'un périodique dans le champ de l'art, menées au CARISM (Centre d'analyse et de recherche interdisciplinaire sur les médias), en passant par une mise en perspective de l'automatisation du travail dans une logique de cohésion sociale et de progrès, recherche menée au CRED (Centre de recherche en économie et droit), dans le cadre d'une thèse d'économie-gestion, etc. La liste n’est pas exhaustive.
À la lumière des témoignages présentés, nous avons pu identifier que les avantages des travaux interdisciplinaires sont nombreux. Ils facilitent la compréhension de phénomènes multifactoriels, permettent de modéliser des systèmes complexes, aident à la décision au sein des organisations, valorisent la recherche fondamentale comme appliquée, conduisent à la mise en œuvre d’applications et d’innovations, etc.
Bref, pour reprendre les propos d’Etienne Maclouf, chercheur au LARGEPA (Laboratoire de recherche en science de gestion Panthéon-assas), la recherche pluridisciplinaire peut être menée dans une optique positive, pour explorer de nouvelles connaissances – à l’instar des travaux que Sylvie Le Bomin, ethnomusicologue, a présentés lors du colloque – ou bien dans une optique normative. Celle-ci, vise à exploiter les connaissances créées, pour un impact socio-économique fort (selon les normes sous-jacentes). Les jeunes chercheurs ont d’ailleurs souligné à plusieurs reprises l’utilité de la pluridisciplinarité (sous-entendu dans un processus de création de valeur économique et/ou sociale).
Cependant, aussi riche et bénéfique soit-elle, cette recherche ne naît pas par hasard et doit être provoquée. Comme le dit Faten Chaieb-Chakchouk, responsable de la majeure IRV (Image réalité Virtuelle) et professeure de Efrei Research Lab, les projets de recherche interdisciplinaire (par exemple dans les champs du numérique et des sciences du vivant ou du numérique et de la transformation des entreprises), naissent de la rencontre de chercheurs qui prennent le temps de s’écouter et de se comprendre mutuellement, avant de percevoir la complémentarité de leurs approches.
Il faut donc inciter les chercheurs appartenant à des disciplines différentes à se rencontrer et à monter des projets aptes à capter les synergies entre leurs méthodes d’investigation, et à analyser en commun les résultats obtenus.
Le contexte institutionnel doit apporter son soutien tant au moment de la naissance des projets que durant leur vie. On sait en effet que la science est organisée en silos disciplinaires - peu poreux - et que le système d’évaluation des chercheurs est davantage tourné vers la spécialisation que vers l’interdisciplinarité. De plus, pour un chercheur, l’acquisition et la mobilisation à bon escient, de connaissances appartenant à des champs disciplinaires différents demande un fort investissement, au risque de ne « savoir rien sur tout » et d’être discrédité par les spécialistes.
En conclusion, nous dirions que ce retour d’expérience appelle à réfléchir sur la manière de créer de véritables ponts entre les disciplines. Il convient véritablement d’aider les chercheurs à communiquer efficacement et à mettre leurs connaissances en commun, tout en identifiant leurs biais cognitifs, sans pour autant renoncer à la culture attachée à leur discipline. C’est tout un champ de recherche qui s’ouvre, au cœur duquel, la recherche sur le management interculturel menée à l’Isit a toute sa place.
[1] Ce colloque s’inscrit dans les actions de l’établissement public expérimental (EPEx) Paris-Panthéon-Assas université.
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